Comment notre autorité de parents fait grandir nos enfants en intelligence émotionnelle et en responsabilité ?  Un article de Marina Blanchart

Quand on travaille dans un centre de consultation en thérapie brève, parmi les différentes problématiques qui conduisent nos patients à prendre rendez-vous, on retrouve beaucoup de questions autour de l’éducation.

Beaucoup de parents, sans doute un peu plus de mamans, consultent pour savoir comment gérer les « crises », les colères, les tensions familiales qui aujourd’hui se cristallisent autour des écrans et des téléphones portables, qui peuvent aussi tourner autour des tâches ménagères, de l’ordre de la chambre ou plus traditionnellement autour du travail scolaire.

Nous choisissons de rencontrer de manière privilégiée l’adulte car c’est lui qui se trouve face à un problème. Comment gérer mon enfant qui vit mal la frustration ?

Il est vrai que pour un enfant ou pour un ado, les limites, ce n’est jamais une bonne nouvelle ! Pour nous, non plus d’ailleurs ! Même si je n’aime pas me plier au code de la route, je le fais à cause des conséquences potentielles de ma non-soumission et si je râle de certaines règles liées au Covid, j’estime que j’en ai bien le droit car il s’agit parfois d’une atteinte à ma liberté. Cependant, ces règles, ces lois sont décidées par les personnes dédiées à cela et réfléchies pour le mieux (de leur point de vue ;-)).

En famille, on est un peu dans la même situation : certains décident plus que d’autres car ils connaissent mieux les tenants et aboutissants (conséquences du trop de temps sur l’écran, du désordre qui génère un manque d’hygiène ou de l’échec scolaire…) et les adultes, puisqu’il s’agit d’eux, vont donc prendre des décisions susceptibles de ne pas plaire à tout le monde. Il est capital que l’adulte soit conscient que cela risque de déplaire, qu’il se prendra des râleries, des récriminations non seulement à l’annonce de la décision mais encore davantage lors de son application.

Comment réagir face à ces crises, colères ou autres manifestations de mécontentement ? On touche le premier problème de nombre de parents bienveillants qui souhaiteraient que leur enfant se soumettent sans broncher, ce qui ne serait pas sain, ni rassurant sur l’estime de soi de l’enfant ! Il est important qu’il puisse exprimer sa frustration. Cependant, ce n’est pas une raison pour y céder.

Il est capital de distinguer la règle sur laquelle nous devons rester ferme et l’émotion qu’elle génère que nous pouvons accueillir avec bienveillance : « je comprends que cela te fasse enrager !! » « Vivement que ce soit toi le papa car tu pourras alors décider. Mais pour l’instant, c’est moi et c’est dur pour toi ! »

Pour nos enfants, les règles sont capitales, elles posent un cadre et sont fondamentalement rassurantes, mais leurs émotions sont nécessaires et il est tout aussi important de leur permettre de les exprimer, même si on aimerait mieux qu’ils applaudissent à deux mains chaque fois qu’on éteint la télévision.

Il est également capital pour l’adulte de prévoir des conséquences en cas de non-respect car sans conséquence, pas de raison de les respecter pour celui qui ne mesurent pas les tenant et aboutissants nommés ci-dessus. Et à nouveau, les prévoir est important, mais les mettre en pratique plus encore, car notre jeunesse va tester le cadre. J’ai eu quelques procès-verbaux de vitesse avant de décider de respecter les limitations. Certains respectent plus facilement, d’autres tentent et observent… C’est le même processus en éducation.

Si la seule conséquence d’une chambre en désordre, c’est maman qui crie un peu et puis ça passe ou mieux encore, une maman énervée qui le fait elle-même… peu de chance de voir du changement, car pas vraiment d’inconfort pour le jeune désordonné.
L’idéal sera de créer des « sanctions » puisqu’il faut bien le dire, on est dans ce registre qui seront les plus proches des conséquences naturelles du fait d’outrepasser la règle. Parents, à votre créativité…

La question à se poser quand on a un problème avec un de nos enfants ou adolescents est : pourquoi changerait-il ? pourquoi respecterait-il plus cette demande ? et s’il n’y a pas de bonne raison, s’il n’y trouve pas d’avantage relativement immédiat pour lui, il ne le fera pas et nous agirions comme lui…
Mon fils, vers ses 14 ans, me disait : « c’est du chantage, en fait ! » et je répondais : « si tu veux, moi j’appelle ça, une conséquence ! Plus tard, si tu ne travailles pas assez, ton patron ne voudra pas te garder, ni te payer à la fin du mois. C’est du chantage ? » Nous avons la responsabilité de préparer nos enfants à la vraie vie et il est donc important qu’ils apprennent assez tôt qu’il y a des conséquences à leurs actes. Cela s’appelle aussi les rendre responsables…
 

Il est donc capital comme parent de choisir nos combats et de tenir bon. Certaines règles sont construites par le ou les parent(s), d’autres en famille, mais ensuite, le maintien du cadre est capital, les conséquences s’il n’est pas respecté aussi et le respect des émotions, la reconnaissance de la frustration comme justifiée aussi.
Nous pouvons aussi choisir d’arrêter certains combats comme l’ordre dans la chambre. Il faut se demander si ce que nous mettons comme énergie est juste pour nous et si nous obtenons des résultats satisfaisants. Sinon, à nous d’aller vers autres chose !

Je peux reconnaitre que c’est difficile, douloureux, enrageant ou frustrant sans pour autant céder sur le fond. C’est véritablement un double pilier de notre éducation.

D’une part, le respect des émotions et le message d’amour inconditionnel qui l’accompagne pour nourrir l’estime de soi de l’enfant ou de l’ado : tu as raison de ressentir ce que tu ressens et tu peux évidemment l’exprimer.  

D’autre part, le cadre qui met des limites et qui met des conséquences claires et justes à qui les franchit.